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cours 2009-10

:: les procédures de dévoilement (4) ::

 

II. DU DEVOILEMENT PAR L’EXPERIMENTATION A LA PRO-DUCTION DE TOUT ETANT

1.    Le mode expérimental du dévoilement

2.    Les déplacements d’une procédure

3.    La physique du psychisme

 

Nous  voudrions à présent montrer que c’est pareillement ― à partir du déplacement de la procédure expérimentale ― qu’une science du psychisme et, plus particulièrement, cette « science de l’inconscient » qu’est la psychanalyse, va pouvoir se constituer, l’ « objet » inconscient se trouvant à son tour dévoilé par la procédure expérimentale.

 

On désigne par psychisme la « pensée élargie », de sorte à ce que puisse y être reconnue une dimension inconsciente, puisque, cartésiennement, « pensée inconsciente » constitue ni plus ni moins qu’une contradiction dans les termes. Et Descartes, en ceci qu’il inaugure une tradition, place de facto sous son autorité, du moins dans l’usage qui sera fait des concepts, l’ensemble de cette tradition.

 

L’apport de Freud, fondateur de la psychanalyse, à qui l’on reconnaît d’avoir « découvert » l’« inconscient psychique », ne réside pas seulement dans la reconnaissance d’une dimension inconsciente du « psychisme », mais peut-être plus encore dans la représentation topique de cet inconscient : celui-ci désigne d’abord une « localité psychique » et, secondairement, une propriété de certaines représentations en vertu précisément de l’appartenance à cette « localité ».

 

Une « représentation » peut être inconsciente en ceci qu’elle est actuellement absente de la conscience mais susceptible de devenir présente. C’est le cas par excellence des souvenirs disponibles, qui peuvent être volontairement réactualisés à tout moment ; c’est le cas, plus généralement, des pensées (au sens très large de contenus de conscience) qui ne retiennent pas l’attention ou sur lesquelles celle-ci ne se dirige pas, qui sont donc présentes dans le champ de la conscience, mais sur le mode de l’implicite, à sa périphérie ou à sa marge. L’inconscient désigne ici un degré inférieur de conscience, une conscience de moindre intensité.

 

Freud insiste par ailleurs fréquemment sur la place de l’expérimentation dans le processus l’ayant conduit à vérifier son hypothèse de l’inconscient. Il nous explique lui-même en être venu à forger ce qu’il désigne comme son « hypothèse de l’inconscient », en premier lieu à partir d’études cliniques, accomplies durant les dernières années du XIXe siècle,  sur l’hystérie, études dans le cadre desquelles de nombreuses observations témoignaient de la « résistance » opposée par certains contenus psychiques à venir à la conscience. D’ailleurs, nous éprouvons nous-mêmes une telle résistance quand, dans la vie quotidienne, nous essayons de comprendre pourquoi nous employons un mot à la place d’un autre (cas du lapsus), ou encore quand nous tentons de découvrir pourquoi nous avons, pendant notre sommeil, fait un rêve dont le contenu nous est à ce point, une fois éveillés, inintelligible. Dans tous ces cas, une force semble s’opposer à ce que le sujet prenne conscience par simple réflexion, quelle que soit l’attention qu’il y consacre, de la cause de ce sur quoi il s’interroge.

 

A partir de ces constatations et expérimentations inaugurales, la « science » freudienne du fonctionnement de  l’ « appareil psychique » se constituera par l’agencement systématique de plusieurs théories.

 

Sans doute est-on fondé à tenir celle du « refoulement » pour la première d’entre elles : la force d’ « opposition » que l’on éprouve pendant le travail par lequel le sujet tente d’amener à la conscience les « représentations inconscientes » doit ici être conçue comme la même que celle qui a produit le refoulement de ces représentations hors de la conscience et qui, de surcroît, les maintient refoulées. Et du processus de refoulement doit être déduite, comme l’écrit Freud, « notre notion de l’inconscient ».

 

Afin de compléter la chaîne de notions où s’inscrit ainsi celle de l’inconscient, encore fallait-il alors préciser ce que le refoulement rejette hors de la conscience et pourquoi intervient un tel processus de refoulement. La thèse majeure de la psychanalyse est à cet égard que tout le dynamisme psychique qui donne matière à refoulement ─ et donc qui produit l’inconscient ─ est régi par ce que Freud appelle « le principe du plaisir » : dès sa première enfance, l’être humain est animé par un ensemble de désirs, de « tendances » ou de « pulsions » dont il est déterminé à chercher la satisfaction et qui correspondent à autant d’expressions de la sexualité, entendue dans toute la diversité des formes qu’elle peut prendre ─ y compris et en premier lieu, donc, dans une « sexualité infantile ». Si, pour des raisons diverses, ces désirs et pulsions ne sont pas satisfaits, une importante quantité d’énergie ─ ce que Freud appelle la « libido » ─ s’accumule et pèse sur la conscience, en suscitant un déplaisir croissant. Le refoulement intervient comme « une sorte d’oubli » qui, en rejetant les désirs hors de la conscience, maintient le degré d’excitation de ce que Freud nomme l’« appareil psychique » à un niveau compatible avec les exigences de la réalité. L’inconscient correspond ainsi, pour l’essentiel, à un ensemble de désirs refoulés.

 

Ces théories conduisant de la résistance au refoulement, du refoulement à l’inconscient, de l’inconscient à la libido, donnent lieu à l’élaboration d’une topique du psychisme, c’est-à-dire à une schématisation du psychisme consistant à reconnaître des « lieux psychiques » (moi, ça, surmoi ─ nous ne considérons ici que la topique définitivement retenue par Freud en 1920).  On dira que le moi correspond à l’ensemble des processus conscients et de ceux qui peuvent d’eux-mêmes devenir conscients. On posera alors que « tout ce qui se passe dans le ça est et demeure inconscient ». « Entre le moi et le ça », le surmoi est désigné par Freud comme « le dépositaire du phénomène que nous nommons conscience morale » et dérive notamment de l’influence exercée par les parents ou les éducateurs. Cette troisième « instance » de l’appareil psychique est supposée jouer en fait un rôle décisif dans le mécanisme du refoulement : puissance d’évaluation et de censure, le surmoi intervient en quelque sorte pour sélectionner les désirs dont la satisfaction, en ne perturbant pas excessivement le rapport du sujet au réel, procure plus de plaisir que de déplaisir.

 

C’est alors une des thèses majeures de Freud que de considérer que des conflits qui opposent le ça et le surmoi résulte toute une série de compromis par lesquels les désirs trouvent à se satisfaire de façon plus ou moins déguisée de tels compromis pouvant aller, dans la vie quotidienne, des rêves aux lapsus et autres actes manqués, mais aussi, quand ces compromis sont plus ratés que réussis, des symptômes névrotiques aux psychoses. Tous ces compromis constituent comme des « retours du refoulé » à la faveur desquels l’inconscient vient au fond hanter la conscience, en suscitant en elle des représentations et des actes dont elle ne peut se penser comme la source.

 

*

 

Critique :

 

Si les théories de la psychanalyse ne sont pas en elles-mêmes philosophiques ― avec la psychanalyse, nous sommes bel et bien dans le cadre d’une science humaine, laquelle se constitue, comme toute science humaine, à partir de l’expérience, donc à partir de l’observation de cas particuliers et, à leur suite, par généralisation inductive ―, il n’en demeure pas moins que doit être reconnue à la psychanalyse, en tant qu’elle consiste dans une anthropologie, fondée sur le déterminisme psychique et, plus exactement, sur le déterminisme de l’inconscient, une portée philosophique.

 

En tant qu’elles aboutissent à une conception de l’homme largement déterminé par les processus qui régissent son appareil psychique, processus pour l’essentiel inconscients, en tant, autrement dit, que non seulement les pensées, mais aussi les actions de l’homme échappent par conséquent à sa lucidité et à son « libre arbitre », les théories psychanalytiques déplacent le déterminisme physique qui, selon la physique classique, dominait le monde de l’objectivité, au sein même de la « subjectivité » humaine.

 

Ainsi les théories psychanalytiques sont négatrices de la liberté humaine, du moins en tant que théories ― là où il y a du déterminisme, en l’occurrence psychique, il n’y a pas de place pour la liberté ―, mais en tant qu’elles entendent se parachever dans la pratique thérapeutique, laquelle a pour finalité de guérir la maladie mentale, ce qui suppose que l’analyste donne au patient les moyens de se libérer de ce qui dans l’ordre de son psychisme détermine la maladie, elles ont une fonction libératrice : la connaissance du déterminisme psychique négateur de liberté joue ici comme la condition de sa libération qui coïncide avec le succès thérapeutique. Comme le dit Freud, « là où le ça était, je dois advenir ».

 

*

 

 

Les théories freudiennes, lesquelles affirment donc l’existence d’un inconscient psychique et apparaissent par là comme novatrices, restent cependant tributaires des anciennes philosophies de la conscience et, en tout premier lieu, du Cartésianisme. Certes l’inconscient est l’autre de la conscience — est inconscient ce qui n’est pas conscient —, mais si l’on peut établir que c’est dans le cadre du modèle en lequel la conscience est cartésiennement conçue que l’inconscient est aussi dévoilé, alors leur parenté nous apparaîtra et il nous faudra conclure non seulement à leur altérité, mais surtout à leur duplicité.

 

Or — premier point —, la pensée est abordée chez Descartes sur le mode de la chose naturelle. En effet, le doute cartésien peut fort bien être interprété comme un acte d’objectivation — acte d’objectivation négatif, en ceci qu’il nie, comme nous l’avons vu, toute réalité et toute vérité —, mais acte d’objectivation néanmoins, dans la mesure où il permet à la pensée de se saisir elle-même sur le mode objectif — comme objet avec lequel elle est dans un rapport primordial, c’est-à-dire elle-même. Est — pour la pensée, pour la subjectivité — ce qui est présent à elle-même ; ce qui est — ici, d’abord, la pensée — est ce qui est présent. En d’autres termes — ontologiques —, la pensée se détermine elle-même sur le mode de cette détermination ontologique propre aux métaphysiques de la présence. C’est bien sur le point essentiel de cette détermination qu’apparaît l’étroit rapport entre la façon dont la physique classique détermine ses « objets » et la façon dont cette première philosophie de la subjectivité détermine la « pensée » comme ob-jet, celle-ci se trouvant de facto réifiée.

 

De fait – deuxième point —, il en va exactement de même pour la psychanalyse, laquelle réifie le psychisme, condition de sa prise en connaissance objective par elle, de sorte que l’inconscient est le simple négatif de la conscience : si est conscience ce qui est présent à la pensée, est inconscient ce qui est non-présent (à la pensée).

 

La prédétermination ontologique de la pensée cartésiennement thématisée et de l’inconscient freudien est donc la même : dans les deux cas, la pensée, le psychisme sont traités sur le modèle de l’objet physique.

 

Plus précisément, l’hypothèse de l’inconscient est appelée par les lacunes de la vie consciente, et la démarche conduisant d’une telle hypothèse à l’affirmation de l’inconscient n’est autre que la méthode expérimentale, à l’œuvre dans toute science expérimentale — en premier lieu, en physique classique —, si bien que, pour peu que l’interprétation s’efforce d’en saisir la parenté quant à la détermination de l’être des étants dont ils font leurs objets, il apparaît que la psychanalyse, comme le souligne Renaud Barbaras, ne constitue guère que le renversement du cartésianisme.

 

*

 

La présentation dans ses grandes lignes de la doctrine freudienne ― la psychanalyse n’est certes pas réductible à Freud, soit précisé au passage ―, s’inscrit dans le cadre, rappelons-le, de l’examen des déplacements de la procédure expérimentale : comme nous en avons fait l’hypothèse, la méthode expérimentale, laquelle consiste dans l’enchaînement hypothèse-expérimentation-vérification et se trouve inauguralement mise en place dans le cadre de la physique classique, va permettre l’avènement des autres sciences expérimentales.

 

Or, c’est précisément ce qu’atteste le cas de la psychanalyse, que nous considérons ici. C’est bien en effet le principe de raison, selon lequel « rien n’est sans raison », et l’exigence afférente qui pose que la compréhension soit saisie des causes, qui initie l’investigation freudienne en direction de ce qui produit la maladie mentale : en un mot, c’est l’exigence de rationalité, fondée sur le principe de raison qui vient rompre avec l’incompréhension et la condamnation antérieures de la « folie » et permettre l’avènement d’une science de l’inconscient.

 

Ainsi l’entendement du scientifique produit-il cette explication causale de son « objet », et ce, en dépit du statut pourtant singulier d’un tel « objet », car l’inconscient n’est certes pas un objet, au sens habituel d’une réalité ouverte à la saisie empirique : ce qui est inconscient, par nature, ne saurait en tant que tel être donné dans aucune expérience.

 

Mais, c’est précisément au niveau de cette difficulté majeure que les théories de la psychanalyse révèle en quelle mesure elles sont étroitement tributaires de l’exigence de rationalité découlant du principe de la raison. Car, le « tour de force » de Freud consiste bel et bien, lors même que la cause présumée du phénomène observable demeure statutairement insaisissable, à postuler que, selon l’impérieuse nécessité du principe de raison, les phénomènes observables ― les symptômes de la maladie mentale― doivent par nécessité avoir une cause ― des « processus psychiques inconscients » ―, et à s’en remettre à la méthode expérimentale elle-même pour que se trouve attesté que ce postulat réfère à une réalité.

 

C’est ce que signale la page 67 de Métapsychologie : « s’il s’avère […] que nous pouvons fonder sur l’hypothèse de l’inconscient une pratique couronnée de succès, par laquelle nous influençons, conformément à un but donné, le cours des processus conscients, nous aurons acquis avec ce succès, une preuve incontestable de l’existence de ce dont nous avons fait l’hypothèse ».

 

Ainsi, la méthode expérimentale pro-duit-elle l’ob-jet dont elle prétendait révéler l’existence, et l’« inconscient » en tant qu’ob-jet est-il bel et bien pro-duit par la mise en œuvre d’une telle procédure ― inventé, bien plus que découvert, dévoilé au sens de l’λθεια grecque, c’est-à-dire au sens d’une pro-duction.

 

 

Transition II/III : Nous avons donc établi, dans ce qui précède, comment deux sciences expérimentales ― la biologie et la psychanalyse ―, en mettant en œuvre la méthode expérimentale, initialement conçue dans le cadre de la physique classique, pro-duisaient leurs ob-jets.

 

Ainsi avons-nous pu vérifier que l’essence des sciences expérimentales, en tant qu’elles se constituent par la mise en œuvre de procédures fondées sur le principe de raison, résidaient dans le dévoilement, c’est-à-dire dans l’ordre d’une pro-duction ouvrant l’accès à une « vérité ». Et, de ce fait, sommes-nous parvenus à l’établissement d’une thèse prenant position par rapport au problème que nous avions initialement construit, celui visant à déterminer si les sciences expérimentales consistent en connaissances (vraies), c’est-à-dire adéquates à une « réalité » qui préexisterait à leurs investigations ou si, au contraire, elles ne procèderaient pas justement à la pro-duction de leurs ob-jets.

 

Nous voudrions, dans ce qui suit, élargir le champ de l’interrogation en considérant l’essence du pro-duire, dans le prolongement de ce que nous avions entrepris en introduction, mais, à présent, de sorte à questionner, dans un premier temps, les rapports entre sciences et technique, pour en venir, dans un second temps, à montrer que ce n’est pas tant dans l’ordre des sciences que la vérité entendue comme dévoilement parvient à son plein déploiement, mais bien plutôt dans l’espace ouvert par l’œuvre d’art.

 

 

III. DE L’ESSENCE DU PRO-DUIRE A LA MISE EN ŒUVRE DE LA VERITE

 

1.    La question de la technique

 

[Nous nous proposons ici de reprendre et d’exposer les principales thèses de « La Question de la technique » (Essais et conférences) de Heidegger, notre œuvre de l’année.]

 

Le propos est ici de faire retour sur les conceptions originaires du pro-duire, lesquelles signalent que celui-ci, ce que les Grecs désignaient comme ποησις (poïèsis) consiste en l’acte par lequel on fait (ad-)venir quelque chose (à l’être) en informant (en mettant en forme) une matière. C’est tout aussi bien d’ailleurs le cas du pro-duire artistique qui fait ad-venir l’œuvre d’art que de n’importe quel pro-duire technique. Et, le mot latin ars, qui a donné notre mot « art », n’est guère que la traduction du grec τέχνη (technè) : ce que nous désignons comme « art » était donc, différence méconnue des Grecs, désigné par un terme qui signifiait tout aussi bien ce que nous appelons « la technique ».

 

Ainsi, toute pro-duction, qu’elle soit technique ou artistique, est-elle le résultat d’un travail, d’un acte pro-ducteur. Les Grecs distinguaient la φσις (physis), ce que la traduction latine rendra par natura (nature), c’est-à-dire ce qui « vient à l’être de soi-même », des choses qui résultent d’un acte pro-ducteur, celui de l’artiste ou de l’artisan, reposant sur une τέχνη (technè, terme que l’on traduira communément par « art », mais qui a aussi, donc, donné notre mot « technique ») — deux ordres donc de ποησις (poïèsis), de pro-duction.

 

Fidèle à sa propre injonction, selon laquelle il s’agit de « se faire l’oreille grecque », Heidegger, dans « La Question de la technique »  (1953), propose, comme nous l’avions déjà signalé en introduction, cette traduction d’un passage (205 b) du Banquet de Platon : « Tout faire-venir (Veranlassung), pour ce — quel qu’il soit — qui passe et s’avance du non-présent dans la présence, est ποησις, est pro-duction (Hervor-bringen) », ce qu’il explicite de la sorte : « Une pro-duction, ποησις, n’est pas seulement la fabrication artisanale, elle n’est pas seulement l’acte poétique et artistique, qui fait apparaître et informe en image. La φσις, par laquelle la chose s’ouvre d’elle-même, est aussi une pro-duction (Hervor-bringen), est ποησις. La φσις est même poïèsis au sens le plus élevé. Car ce qui est présent a en soi (cette possibilité de) s’ouvrir (qui est impliquée dans) la pro-duction, par exemple (la possibilité qu’a) la fleur de s’ouvrir dans la floraison. Au contraire, ce qui est pro-duit par l’artiste ou l’artisan, par exemple la coupe d’argent, n’a pas en soi (la possibilité de) s’ouvrir (impliquée dans) la pro-duction, mais il l’a dans un autre, dans l’artisan et dans l’artiste ».

 

Mais, dans « La Question de la technique »,  nous lisons par ailleurs que « la technique n’est pas seulement un moyen : elle est un mode du dévoilement. Si nous la considérons ainsi, alors s’ouvre à nous, pour l’essence de la technique, un domaine tout à fait différent. C’est le domaine du dévoilement, c’est-à-dire de la vérité ».

 

Pour parvenir à saisir que l’essence de la technique réside dans le dévoilement, Heidegger met tout d’abord en discussion la conception qui nous est familière de la technique, laquelle nous concevons spontanément à partir de la distinction des moyens et des buts. C’est là la « conception instrumentale » de la technique, dont on ne peut, certes, qu’accorder qu’elle est exacte, mais sans pour autant qu’elle ait lieu d’être tenue pour vraie.

 

La méditation en direction de l’essence de la technique part d’une analyse de la causalité, dans la mesure où la conception instrumentale, qui fait de la technique l’ordre des moyens, y renvoie : « Là où des fins sont recherchées et des moyens utilisés, où l’instrumentalité est souveraine, là domine la causalité ». On ne peut comprendre ce dont il est question dans l’instrumentalité si l’on ne s’interroge pas d’abord sur ce que l’on entend par causalité, puisque l’une habite l’autre et la constitue. La technique est instrumentale suivant les modalités des formes de la causalité, qui, à leur tour, sont historiquement et culturellement constituées.

 

Et il s’agit, ici encore de reprendre Aristote, et plus précisément sa célèbre théorie des quatre causes : on sait que celui-ci distingue la cause matérielle (l’argent dont est fait la coupe), la cause formelle (la façon dont l’argent est informé pour qu’advienne cette coupe, par référence à l’idée de coupe), la cause efficiente (l’activité de l’orfèvre qui fabrique la coupe) et la cause finale ( l’usage auquel la coupe est destinée). Ces différentes causes concourent à l’existence de la coupe ; elles l’accompagnent. C’est ce qui les unit, ce qui les constitue comme un ensemble cohérent, une totalité. « Les quatre modes de l’acte dont on répond conduisent quelque chose vers son “apparaître”… L’acte dont on répond a le trait fondamental de ce laisser-s’avancer dans la venue… Ce qui n’est pas encore présent, ils le laissent arriver dans la présence » (vide supra la traduction et l’interprétation proposées par Heidegger du Banquet, 205 b).

 

Nous retrouvons donc ici ce que les Grecs, à l’aube de la culture occidentale, désignaient comme ποησις (poïèsis), laquelle n’est pas seulement une effectuation, une fabrication, mais ce par quoi quelque chose advient, se manifeste par soi-même ou est manifestée par l’action d’autre chose. Elle est ce qui conduit une chose qui n’est d’abord qu’en puissance vers sa manifestation ― une pro-duction, donc.

 

Mais, élément constitutif de l’oubli de l’être du pro-duire, la tradition (métaphysique) qui suivra Aristote perdra cette conception de la causalité, pour ne plus reconnaître comme cause que la seule causalité efficiente, les autres, et en particulier la cause finale, conçues comme peu rationnelles. De ce fait, advient un véritable changement du contenu de la notion de causalité revenant à perdre son sens originel : nous en sommes venus à ne concevoir la causalité que comme « ce qui opère », alors que les Grecs la concevaient comme « ce qui répond d’une autre chose ».

 

Et, selon son sens originaire, c’est parce que la technique est pro-duction, au sens de la ποησις, de ce qui ne se manifeste pas par soi-même, de ce qui n’a pas par soi la capacité à apparaître, mais nécessite une action extérieure, qu’elle est, elle aussi, dévoilement et, par là, a à voir avec la vérité.

 

Considérant l’histoire de la technique, Heidegger interroge ce qui sépare la technique traditionnelle de la technique moderne et contemporaine, articulées au savoir scientifique : si la technique est originairement pro-duction, sa forme actuelle accomplit cette essence. En effet, la technique moderne « est une pro-vocation par laquelle la nature est mise en demeure de livrer une énergie qui puisse comme telle être extraite et accumulée ». La nature est alors « requise » pour les caractéristiques qui peuvent concourir à la production de quelque chose, elle est sommée de livrer ce qu’elle re-cèle. D’une certaine façon, on peut dire qu’il n’y a plus de relation avec la nature, mais une utilisation de la nature qui n’est plus considérée que comme un fonds d’où telle ou telle chose peut être tirée. Elle fournit de l’énergie, elle fournit des aliments, elle fournit même des paysages à l’industrie des loisirs.

 

Mais la technique, qui ramène toute chose à n’être considérée que comme un fonds exploitable et qui l’assujettit à l’exécution de procédures soumises à une direction extérieure et constante, n’engage pas que de la « technique ». Les enchaînements qu’elle tisse et dans lesquels elle prend les choses comme les hommes, pour les ramener à n’être plus tout à fait des choses ni des hommes, mais un fonds toujours « commissible », toujours susceptible d’être mis en œuvre dans le mouvement d’une exploitation généralisée de l’énergie naturelle, renvoient clairement à un fonctionnement économique et à une organisation politique, ils renvoient surtout, aux yeux de Heidegger, à une forme de savoir, à une orientation de la connaissance caractéristique de la science moderne : l’essence de la technique réside dans le dévoilement arraisonnant et, à ce titre, beaucoup plus fondamentalement qu’un ensemble d’applications des connaissances scientifiques, elle est ce qui ouvre le champ de l’arraisonnement scientifique.

 

 

                            2. La vérité de l’art

 

Nous l’avons dit, pour les Grecs de l’Origine, la pratique de l’art est essentiellement liée à celle de la technique : l’artisan et l’artiste sont un. Mais la question se pose alors de la spécificité qu’il est tout de même — dans le cadre d’une telle conception — possible de reconnaître aux pro-ductions qui se trouveront ultérieurement désignées comme relevant de l’ « art » : de quel type spécifique de ποησις l’œuvre d’art résulte-t-elle ? Nous allons voir des philosophies grecques de l’ « art », jusqu’aux interrogations contemporaines portant sur les œuvres, l’enjeu sera de thématiser les rapports entre art et vérité.

 

 

Si l’œuvre d’art est le résultat d’un travail, comme tout produit, l’homme ne créant jamais rien ex-nihilo, elle résulte de la mise en forme d’une matière (naturelle). Ce sont les caractéristiques de cette mise en forme qui vont déterminer celle de l’œuvre.

 

Dans la philosophie grecque de l’Antiquité —, c’est à partir de la catégorie d’« imitation », de la catégorie de μίμησις (mimèsis) que l’acte de pro-duction de l’artiste et, au-delà, l’art en général se trouvent interprétés : ce que nous appelons « les arts » se trouvent couramment désignés comme μιμητικα τέχναι (mimêtikaì tékhnai), de sorte que « l’art imite la nature » constitue un lieu commun de la philosophie grecque.

Mais encore faut-il s’entendre sur ce que l’on désigne par « imitation ». De fait, les définitions de la μίμησις (mimèsis) diffèrent-elles sensiblement chez Platon et chez Aristote. Ce conflit d’interprétations commande l’antagonisme entre la conception platonicienne et la conception aristotélicienne de l’art.

 

Par μίμησις, Platon entend une dégradation, d’abord au sens ontologique du terme : l’acte d’imiter consiste en effet à produire à partir d’un original servant de modèle la copie de cet original, laquelle par nécessité, dans le cadre de l’axio-ontologie platonicienne, aura un degré d’être moindre que celui du modèle : comme l’ombre portée d’un corps a moins d’être que ce corps lui-même, la chose que le peintre représentera aura moins d’être que la chose elle-même. Pour reprendre l’exemple qui nous est donné au livre X de La République, le lit peint par l’artiste constitue une dégradation du lit fabriqué par l’artisan, du lit réel, puisque la peinture ne le donne à voir que sous un seul angle.

 

Si l’art — Platon se réfère essentiellement ici aux arts visuels, comme la peinture ou la sculpture — consiste en une imitation de la réalité, force est de reconnaître qu’il se contente d’offrir à la vue des copies de la réalité, c’est-à-dire des apparences, et non la réalité elle-même.

 

Or l’apparence (d’une chose), selon son concept, désigne la façon dont cette chose apparaît aux sens, laquelle peut fort bien ne pas coïncider avec ce qu’est cette chose en réalité (le bâton plongé dans l’eau nous apparaît comme brisé, alors qu’en réalité il ne l’est pas). C’est pourquoi nous avons coutume de dire des apparences qu’elles sont maîtresses d’illusion et donc trompeuses.

 

C’est précisément en ce sens que Platon condamne l’art : l’art ne donnant à voir que des apparences des choses, il trompe sur la réalité, il induit en erreur. Cette conception platonicienne se comprend d’autant mieux si on se réfère à ce qu’était l’art grec de l’époque de Platon — essentiellement figuratif. En outre, Platon songe aux célèbres anecdotes bien connues du monde grec : les raisins peints par Zeuxis ou le concours entre Phidias et Alcamène.

 

Dans cette perspective platonicienne, l’art peut être considéré comme l’antithèse de la philosophie, laquelle, loin de se contenter du sensible, de ce qui est donné aux sens, consiste en un mouvement de l’intelligence (du νος) vers les Idées, réalités intelligibles qui, dans la conception platonicienne de l’être (au sens de tout ce qui est), existent en elles-mêmes — ce sont des archétypes, l’être en-soi — et sont, plus encore, les modèles, les paradigmes — de toutes choses.

 

Il faut rappeler ici le privilège tout occidental accordé à la vue sur les autres sens, ce qui inaugure une interprétation de l’art, à partir des seuls arts visuels. Dans l’Hippias majeur, en particulier, se trouve affirmée la supériorité ontologique du regard. Le regard, en effet, est ce qui par excellence assure « l’être », c’est-à-dire, tel qu’il est platoniciennement conçu, les formes. De ce fait, se comprend et se justifie, a contrario, le caractère incertain de l’ouïe, car les formes ne saurait être reconnue par l’oreille, ni par l’extrême fragilité de l’odorat et du toucher qui ne peuvent correspondre qu’à des plaisirs douteux et des reconnaissances particulièrement fragiles. A l’opposé, le vrai est ce qui se laisse voir dans la plus grande clarté et ce, dès Platon, pour se poursuivre dans les textes fondateurs du christianisme.

 

Cette condamnation de l’art du point de vue de la vérité — l’art jouant sur les apparences est trompeur — se double, pour des raisons internes à la conception platonicienne de l’être, mais qui se peuvent tout aussi intuitivement bien saisir, d’une condamnation morale et politique : les artistes qui par leurs œuvres abusent leurs concitoyens quant à la réalité des choses ont une influence négative sur la Cité. Une telle défiance trouvera un prolongement des plus concrets dans la Cité idéale, cette première « utopie », que Platon présente dans La République : il s’agira d’en bannir les artistes.

Toutefois, dire de l’art qu’il consiste en une imitation de la réalité, au sens où il se contenterait de la copier, revient à en proposer une conception pour le moins réductrice : même si l’on ne se réfère qu’aux seuls arts visuels, force est de reconnaître qu’ils ne se contentent pas d’imiter la réalité en ce sens étroit.

 

Aristote, lequel reconnaît lui aussi, dans La Physique, que « l’art imite la nature », donne cependant au concept d’ « imitation » une extension beaucoup plus large que ne le faisait Platon. Ainsi lisons-nous en 1460b7 de La Poétique que l’artiste « doit nécessairement adopter une des trois manières d’imiter : il doit figurer les choses ou bien telles qu’elles furent ou sont réellement, ou bien telles qu’on les dit et qu’elles semblent, ou bien telles qu’elles devraient être ».

 

Ainsi l’œuvre cesse-t-elle d’être pensée comme subordonnée à la réalité sensible, puisque l’imitation dont elle procède ne consiste qu’en l’un de ses trois modes en une simple copie des choses qui existent et que, partant, l’on perçoit. L’artiste, au cours de l’acte pro-ducteur qu’il accomplit, peut tout aussi bien se référer à ce qui est possible ou encore à ce que serait l’idéal. N’est-il pas courant qu’un peintre embellisse, c’est-à-dire idéalise son modèle ? Zeuxis était par exemple réputé pour peindre des hommes plus beaux que nature. En d’autres termes, semblent se trouver réunies les conditions pour que la beauté artistique puisse être pensée en tant que telle et qu’il n’y ait rien dès lors qui s’oppose à ce qu’on la reconnaisse comme pouvant dépasser la beauté des choses naturelles.

 

Du coup, le propos repris à son compte par Aristote, selon lequel « l’art imite la nature », ne doit plus s’entendre, comme la conception platonicienne nous y poussait, au sens réducteur où il se contenterait de la copier, mais au sens où, comme elle, il pro-duit et ce, d’une façon autonome — selon des règles qui lui sont propres. L’art est donc susceptible de rivaliser avec la nature. Et, c’est ce sens large d’ « imiter » qui sera maintenu par la tradition post-aristotélicienne : ainsi faut-il entendre, en particulier, le propos de Saint Thomas d’Aquin, selon lequel « ars imitatur naturam in sua operatione » (l’art imite la nature, littéralement, « dans son opération », c’est-à-dire « selon sa manière propre d’œuvrer »).

 

Bien plus, et ainsi se précise en quelle mesure la conception d’Aristote constitue l’antithèse de celle de Platon, l’art loin de nous éloigner de la vérité possède une fonction heuristique — il permet à l’homme de progresser dans ses connaissances. En effet, Aristote attribue le plaisir que l’homme ressent au contact des œuvres au fait qu’il reconnaisse intellectuellement en elles ce qui les relie mimétiquement à la réalité naturelle : « on se plait à la vue des images parce qu’on apprend en les regardant et qu’on en déduit ce que représente chaque chose, par exemple parce qu’on identifie telle figure avec telle personne » (Poétique, 1448b).

 

En outre, c’est parce que l’art est μίμησις (mimèsis), imitation — au sens large — qu’il est aussi κάθαρσις (catharsis), purification, ce dernier terme désignant essentiellement ce qui se produit du côté du spectateur lors du spectacle tragique : les émotions et les passions sont exposées sur la scène et le plaisir qu’éprouve le spectateur, allant de pair avec l’identification mimétique dont on parlait plus haut, réside dans le fait qu’assistant au spectacle de ses propres passions sous une forme exacerbée et les reconnaissant comme telles, il peut prétendre s’en libérer. Advient alors la possibilité d’une purification tant « thérapeutique » que politique : le spectacle tragique peut produire l’effet de purifier les âmes et de supprimer l’ ὕϐρις (hybris) la démesure qui menace l’ordre social.

 

Ainsi, la conception aristotélicienne de l’art constitue à bien des égards l’antithèse de celle de Platon : si, pour Platon, l’art comme mise en œuvre d’apparences obscurcit l’Idée, c’est-à-dire éloigne de la vérité, pour Aristote au contraire, l’œuvre est propre à élargir notre connaissance, en ceci qu’elle jette pour ainsi dire un autre éclairage sur la réalité que celui que nous avons dans l’expérience sensible.

 

Mais, au-delà de ce qui oppose ces deux conceptions, force est de reconnaître ce qui les unit du point de vue de leurs fondements : elles partent toutes deux de la notion de μίμησις (« l’art imite la nature ») et, même si elles ne l’entendent certes pas dans le même sens, cela revient pour chacune d’elles à poser que toute τέχνη (technè), c’est-à-dire aussi bien la « technique » que l’ « art », lequel ne sera que tardivement conçu comme opposé à celle-ci, est fondamentalement ποησις (poïèsis), pro-duction.

 

*

 

Reprenant cette interrogation sur les rapports entre art et vérité, Heidegger, dans sa conférence sur     « L’Origine de l’œuvre d’art » (Holzwege), déploie un certain nombre d’interrogations : d’où vient l’œuvre ? Elle tire de toute évidence son origine de l’artiste. N’est-on pas artiste uniquement par les œuvres que l’on a réalisées ? L’artiste est à l’origine de l’œuvre, mais l’œuvre est à l’origine de l’artiste. Où réside l’art ? Non pas dans la capacité de l’artiste, mais dans l’effectivité de l’œuvre. Il faut bel et bien partir de l’œuvre. Qu’est-ce donc qu’une œuvre ?

 

Une œuvre d’art est d’abord une chose. Les œuvres, comme des choses, sont transportables, stockables, plus ou moins périssables, éventuellement commercialisables. Mais qu’est-ce qu’une chose ? Les définitions traditionnelles, métaphysiques, de la chose suffisent-elles pour le dire et pour mettre en lumière l’essence de l’œuvre ? Rien n’est moins sûr : Heidegger analyse en particulier la définition de la chose comme une matière qui a reçu l’empreinte d’une forme, qui semble convenir parfaitement à l’œuvre d’art. Cette définition, héritée d’Aristote, dérive en fait d’un modèle instrumental, utilitaire et artisanal. C’est de l’outil que nous vient la notion de la chose comme matière informée. Dans l’usage, le matériau est oublié. Quand un outil fonctionne, il laisse disparaître la matière dont il est fait. Seul apparaît l’usage.

 

Mais, il n’en est nullement ainsi en ce qui concerne l’œuvre d’art.

 

Comme c’est l’œuvre qui à présent importe, il s’agit d’initier la méditation à partir d’une œuvre particulière : si nous regardons, suggère Heidegger, un tableau de Van Gogh représentant une paire de souliers, nous ne pouvons évidemment rien en faire. Mais le tableau nous montre l’outil en tant qu’outil, la relation de ces souliers au travail de la terre qui les a usé et déformé. Ces souliers usés évoquent le lien obscur avec la terre et le dur monde du paysan qui les a portés. L’œuvre d’art ne présente donc pas ici simplement de façon réaliste et imitative une matière et une forme, une chose enfermée dans son contour ou son usage, mais la vérité implicite d’une chose, que son usage ordinaire cache. Le tableau de Van Gogh révèle les souliers dans leur vérité, l’être-outil de l’outil : il dégage une vérité qui est dévoilement, une vérité qui n’est nullement « adéquation ». La vérité que l’œuvre d’art donne à voir n’est pas une vérité abstraite et, encore moins, universelle ; c’est au contraire une vérité située dans le temps et dans l’espace qui est à chaque fois celle d’un monde et d’une terre déterminés.

 

Pour éviter de retomber dans le schéma de l’imitation suggéré par l’exemple des souliers, Heidegger passe à un autre exemple, celui du temple grec. Un temple grec n’est à l’image de rien, n’imite rien. Que fait-il ? Il met en place un monde et révèle une terre. Or un monde, montre Heidegger, n’est ni un assemblage d’objets ni un réceptacle qui les recueillerait, mais c’est un libre espace de possibilités, l’espace de sens et de relations qu’ouvre un peuple par ses choix essentiels, ses décisions concernant la vie / la mort, le vrai / le faux, l’humain / le divin, etc., ce que Heidegger, s’appuyant sur sa lecture de Hölderlin, en viendra à désigner comme Quadriparti, jusqu’à écrire l’être sous biffure : l’être. Le Quadriparti est le rassemblement des Quatre : la Terre et le Ciel, les Divins et les Mortels.

 

Le temple, comme toute œuvre, assemble un monde : elle en dit la vérité, dans la mesure où elle le rend présent, elle le dévoile : le temple, par exemple, lorsqu’il fait voir les dieux dans ses sculptures, les fait venir à la présence. De plus, un monde appartient toujours à une époque de l’histoire et il y a plusieurs mondes pour chaque époque parce qu’il y a plusieurs peuples, chacun séjournant dans sa langue.

 

Ainsi, pour Heidegger, lequel ravive par ailleurs la conception originaire de la vérité comme dévoilement, le pro-duire de l’artiste qui fait ad-venir l’œuvre se situe dans l’essence de la vérité, en ceci que l’œuvre, dévoilant un monde, est mise en œuvre de la vérité (de l’être).

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